Face à la crise provoquée par la pandémie de Covid-19, plusieurs contextes d’interaction humaine sont en train de subir des transformations majeures. Un nombre croissant d’individus fait désormais l’expérience du travail à distance, et doit composer entre sociabilités amicales, familiales et professionnelles. Dans plusieurs secteurs d’activité, on assiste à l’introduction massive de systèmes de surveillance et de modalités de rémunération qui étaient jusque-là limitées au travail sur les plateformes numériques. Ces dernières s’imposent, autant pour les personnes employées que pour celles faisant face au chômage, comme des paradigmes productifs qui conjuguent « travail à la demande » (livraison, logistique, etc.), « travail en ligne » (freelancing, gig economy et microtravail) et « travail social en réseau » (génération et modération de contenus). Le monde du travail qui s’annonce généralise des méthodes de gestion de l’humain qui transfèrent de manière exponentielle sur les travailleuses et travailleurs les risques, autant sur le plan sanitaire qu’économique.
Antonio A. Casilli est professeur de sociologie à Telecom Paris, école des télécommunications de l'Institut Polytechnique de Paris. A l'EHESS, il anime le séminaire "Étudier les cultures du numérique". Il est parmi les fondateurs du réseau ENDL (European Network on Digital Labour). Parmi ses publications : Les liaisons numériques (Seuil, 2010), En attendant les robots (Seuil, 2019).