Représenter l’économie, le pouvoir, les lobbies grâce aux visualisations de données : quand le designer fait l’équilibriste
A la frontière entre art, design, technologies et activisme se trouve ce que Carl DiSalvo appelle l’adversarial design : une production d’objets ou d’interfaces qui ouvrent des espaces de confrontation politique, offrent des ressources et des opportunités de participer au débat public ou à la contestation. La visualisation de données et d’informations s’inscrit dans cette famille d’artefacts quand elle permet aux citoyens de voir et percevoir des rapports, des tendances, des forces dans les enjeux publics, quand elle soulève de nouvelles questions et crée des zones de tensions idéologiques.
Salle Gosling (F08)
A partir de cet angle d’approche, je présenterai le travail de recherche que j’effectue sur la visualisation de données économiques et en particulier sur la visualisation des réseaux de lobbying dans les institutions européennes. Ces exemples, auxquels s’ajouteront quelques visualisations historiques, permettront de dégager trois axes méthodologiques permettant de décrire la spécificité du design dans le champ de la visualisation de données. Le premier concerne le rapport à la complexité : à travers des interfaces sur mesure, des modes de scénarisation, nous verrons comment il est possible de guider dans la complexité plutôt que de la simplifier. Le deuxième axe abordera la prétendue objectivité ou l’impression de rationalité qui émane des visualisations de données et l’intérêt du designer à privilégier la transparence des méthodes à une neutralité veine. Enfin, nous verrons ce qu’implique le fait de considérer et de traiter les visualisations de données comme des images à travers la rhétorique et la puissance symbolique.